Connect with us

Culture

Dans une profondeur face au féminisme originel ?

Published

on

« Il n’y a personne qui sacrifie son honneur pour l’être qu’il aime. »

« C’est ce que des centaines de milliers de femmes ont fait. »

Le texte original se passe d’explications. Dans la Norvège de 1879, c’est déjà un scandaleux ovni féministe qui voit le jour et la censure ne tarde pas. Une maison de poupée s’impose comme une pièce prônant très tôt la liberté des femmes (Nora en figure de proue) et un rapport au couple qui est celui de l’inversement du pouvoir et de l’influence traditionnels. Alors pourquoi adapter Ibsen aujourd’hui ? Et surtout pourquoi réécrire Ibsen ? Le projet ambitieux de Lorraine de Sagazan ne fait pas que réactualiser la pièce, il la complexifie.

Nora, empreinte chez Ibsen de sagesse et de réserve, devient cette pile électrique, cette working girl acharnée qui, le soir du réveillon, passe son temps au boulot. Torvald se métamorphose, lui, en desperate housewife déluré et dépensier, bien loin de cette image placide et patriarcale qui émanait de lui à l’origine.

C’est là que se trouve la pertinence de l’adaptation : en y apportant des enjeux résolument modernes, le texte se colore d’une profondeur inédite. On y voit une idéologie différente : la femme n’est plus soumise en apparence, elle est dans cette illusion de puissance que lui confère un patriarcat en retrait mais bien présent puisqu’il la contient dans ce rôle risible ; elle est le dindon de la farce, celle autour de qui se jouent les enjeux d’un monde qu’elle ignore. En fin de compte, Lorraine de Sagazan ne libère pas, elle dénonce. Sa Nora, c’est encore une nouvelle Iphigénie, sacrifiée sur l’autel des querelles viriles. Son Torvald se ferait alors presque Scapin…

Evidemment, elle crie Nora. Elle hurle même, et entre ses respirations haletantes et syncopées, on devine le cri atavique des centaines de milliers de femmes qui ont fermé leur gueule. La mise en scène appuie sur la plaie, c’est après trop de bruit que viennent s’inscrire sur un écran conclusif et dans un silence bouillonnant les lignes les plus engagées du texte original. « Il faut que je veille à être libre maintenant. » Oui, mais qui les prononce ? Si l’on suivait la logique de l’adaptation, ce serait Torvald, l’homme. Pourtant, tout dans le déroulement de l’intrigue semble les attribuer à nouveau à Nora. Si l’on peut regretter l’astucieuse esquive de cette difficulté de réécriture, le message est bien présent et l’on comprend qu’adapter Ibsen ce n’est pas faire du féminisme facile, c’est tenter d’actualiser un propos qui a perdu de sa justesse mais jamais de sa vérité. Ces lignes finales, c’est le.a spectateur.rice qui est invité.e à les lire devant le silence obstiné des personnages, après la tempête des cris, paroxysme de l’intensité de la pièce.

Alors oui, cette adaptation de Lorraine de Sagazan interpelle et interroge. Elle interpelle parce que les valeurs sont inversées et que des répliques initialement écrites dans la bouche d’un homme prennent un écho tout autre dans la bouche d’une femme. Elle interpelle parce que les comédien.ne.s nous apostrophent régulièrement, nous spectateur.rice.s sommes pris à partie. Elle interroge parce que cette adresse finale au public qui prend la forme de répliques à lire nous renvoie la réflexion que ces dernières portent.

Au-delà de ces considérations, cette mise en scène proposée par Lorraine de Sagazan est résolument moderne. Le couple formé par Nora et Torvald se transforme en une forme de trouple qui ne dit pas son nom, ou plutôt un triangle amoureux dans lequel le docteur Rank, un ami des marié.e.s, est laissé pour compte, voué à aimer Torvald sans retour. Pendant que le mariage des deux personnages principaux se désagrège au fil des attentes déçues de l’un.e envers l’autre, c’est l’histoire d’amour entre Kristine Linde et Niels Krogstad qui renaît. Deux visions de l’amour s’opposent alors : l’une intransigeante sur les questions de la morale, où les non-dits tuent à petit feu le couple, et l’autre ouverte au pardon et à l’espoir, peut-être plus libre aussi, comme le laisse penser l’organisation de la scénographie : ces deux amoureux.ses sont les seul.e.s à échapper à cette situation de huis-clos mortifère.

Enfin, la grande réussite de cette libre adaptation se trouve également dans l’exploitation de toute la variété de tons que l’on lit dans le texte d’Ibsen. D’un ton souvent comique cynique au début, on passe à un ton grave, qui se dégrade au fur et à mesure que la tension s’installe, jusqu’à atteindre son paroxysme à la toute fin. Cette tension grandissante s’accompagne d’une mise en scène qui se renferme peu à peu dans l’espace confiné de la maison de poupée. Si au début les commentaires méta-théâtraux sur ce qui se joue dans cet huis-clos sont fréquents dans le premier acte, Nora et Torvald deviennent de plus en plus astreint.e.s à l’espace de la pièce principale, sans sortie possible, alors que les trois autres personnages arrivent à en sortir… par l’amour ou par la mort.

Si vous avez l’occasion d’aller voir cette mise en scène d’Une maison de poupée, courez-y !

Une maison de poupée, mise en scène de Lorraine de Sagazan, avec Jeanne Favre, Jonathan Cohen, Lucrèce Carmignac, Antoine Meyer Esquerré et Benjamin Tholozan. Compagnie La Brèche.

Dans le cadre du festival Les Enfant.e.s du désordre organisé par La Ferme du Buisson.

Photo de couverture : Benjamin Tholozan Jeanne Favre et Romain Cottard dans la mise en scène de Lorraine de Sagazan, crédits Vincent Arbelet.

Isabelle Vallet et Jules Mahé

Continue Reading
Click to comment

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Culture

Le mécénat universitaire français : une révolution silencieuse au service de l’excellence académique

Published

on

Mécénat universitaire français fondations universités partenariats entreprises

Un élan philanthropique sans précédent

Le mécénat d’entreprise français connaît une dynamique remarquable, avec plus de 172 000 entreprises mécènes en 2023 selon le dernier Baromètre Admical-IFOP, représentant un investissement de 2,9 milliards d’euros déclarés. Cette croissance exceptionnelle (+55% d’entreprises mécènes entre 2021 et 2023) témoigne d’un engagement croissant du secteur privé pour l’intérêt général.

Dans ce contexte favorable, l’enseignement supérieur et la recherche bénéficient d’un intérêt grandissant de la part des entreprises, qui y voient un investissement stratégique pour l’avenir. Les universités françaises, dotées depuis la loi LRU de 2007 d’outils dédiés comme les fondations universitaires et partenariales, ont su saisir cette opportunité pour diversifier leurs ressources et amplifier leur impact.

Des fondations universitaires qui font leurs preuves

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : trois universités sur quatre disposent aujourd’hui d’une fondation, permettant de collecter en moyenne 623 000 euros par an au titre du mécénat. Ces ressources complémentaires, bien qu’elles ne bouleversent pas les budgets universitaires, permettent de financer des projets innovants qui n’existeraient pas autrement.

Le réseau des fondations universitaires, qui compte déjà 48 fondations membres, illustre cette montée en puissance collective. Ces structures accompagnent leurs établissements dans la réalisation de leurs missions principales : recherche, innovation, formation et égalité des chances.

Les projets financés révèlent la diversité et la richesse des initiatives : 62% concernent des projets de recherche hébergés par des chaires, 52% portent sur le montage de formations universitaires innovantes, 48% soutiennent la recherche hors chaires, et 33% financent des bourses d’égalité des chances.

L’excellence d’un savoir-faire français

Cette transformation du paysage universitaire s’appuie sur l’émergence d’une véritable expertise française du fundraising académique. Cette professionnalisation se traduit par des succès concrets : certaines fondations ont collecté plusieurs millions d’euros, démontrant la capacité des universités françaises à attirer des financements privés significatifs.

Le parcours de Sandra Bouscal, forte de son expérience à l’INSEAD puis à Dauphine, illustre parfaitement cette réussite française. Son expertise a contribué à développer des méthodes adaptées aux spécificités françaises, créant un modèle original entre tradition républicaine et ouverture internationale.

Un impact territorial majeur

L’ancrage local constitue l’une des forces du mécénat universitaire. 88% des mécènes agissent au niveau local ou régional, une progression de 12 points par rapport à la précédente édition du baromètre. Cette proximité facilite les partenariats entre universités et entreprises locales, créant des écosystèmes d’innovation dynamiques.

Les universités de province tirent particulièrement leur épingle du jeu dans cette configuration, bénéficiant de relations privilégiées avec les acteurs économiques de leur territoire. Comme le souligne Thibault Bretesché, directeur de la fondation de l’université de Nantes : “La dynamique est plutôt positive. Nous avons déjà 23 projets au sein de la fondation ! Nous répondons à un vrai besoin des entreprises et de nos collègues.”

Des motivations alignées sur l’intérêt général

Les entreprises mécènes des fondations universitaires sont guidées par quatre motivations principales : l’incarnation de leurs valeurs (première motivation), le développement de liens privilégiés avec l’université, l’ancrage territorial renforcé, et l’implication de leurs collaborateurs dans des projets d’intérêt général.

Cette convergence d’objectifs entre monde académique et entreprises crée des synergies fécondes. Comme l’observe Patrick Llerena, directeur général de la fondation de l’Université de Strasbourg : “Je suis positivement étonné par l’écoute que nous recevons de la part de nos donateurs. L’université est souvent méconnue et peu appréciée. Mais, après avoir échangé, ils me disent souvent : ‘Je ne pensais pas que vous faisiez tout cela !’ On casse des barrières.”

Vers un modèle français d’excellence

Le développement du mécénat universitaire français s’inscrit dans une démarche d’excellence qui respecte les valeurs républicaines tout en s’ouvrant aux meilleures pratiques internationales. Contrairement aux modèles anglo-saxons, l’approche française privilégie la complémentarité public-privé plutôt que la substitution.

Cette spécificité française trouve son expression dans la diversité des projets soutenus et l’attention portée à l’égalité des chances. Les fondations universitaires ne se contentent pas de lever des fonds : elles créent des ponts entre l’université et la société, favorisant l’innovation et le transfert de connaissances.

Des perspectives d’avenir prometteuses

Malgré le contexte budgétaire contraint, 74% des entreprises mécènes souhaitent maintenir leur budget de mécénat au même niveau dans les deux prochaines années. Cette stabilité, conjuguée à la montée en puissance du mécénat de compétences (20% des mécènes en font une priorité), ouvre de nouvelles perspectives pour les universités.

L’essor du mécénat environnemental (près de 20% des entreprises mécènes soutiennent cette thématique) et le développement des partenariats innovants laissent présager d’un avenir prometteur pour cette collaboration public-privé exemplaire.


Le mécénat universitaire français illustre la capacité d’adaptation et d’innovation de notre enseignement supérieur. En réussissant à concilier excellence académique, ouverture sur le monde économique et respect des valeurs républicaines, il trace la voie d’un modèle original et performant au service de l’intérêt général.

Continue Reading

Culture

Céline Dion, atteinte d’une maladie neurologique rare, reporte sa tournée européenne

Published

on

La maladie de Céline Dion

Céline Dion, la célèbre chanteuse canadienne, a annoncé le 8 décembre 2022 qu’elle souffrait d’une maladie neurologique rare appelée syndrome de l’homme raide. Cette maladie entraîne une raideur musculaire et des spasmes progressifs qui affectent la mobilité et la qualité de vie. Céline Dion a expliqué dans une vidéo publiée sur Instagram qu’elle devait reporter sa tournée européenne prévue pour 2023 afin de se concentrer sur sa santé et son traitement.

Qu’est-ce que le syndrome de l’homme raide ?

Le syndrome de l’homme raide est un trouble du système nerveux central qui se caractérise par une rigidité musculaire et des spasmes involontaires. Il s’agit d’une maladie auto-immune rare qui touche environ une personne sur un million. Les causes exactes du syndrome de l’homme raide sont encore mal connues, mais il semblerait qu’il soit lié à la production d’anticorps anormaux qui attaquent les cellules nerveuses. Le syndrome de l’homme raide peut affecter n’importe quel groupe musculaire, mais il touche principalement les muscles du tronc et des membres.

Voici une vidéo relatant ces faits :

Les symptômes peuvent varier en intensité et en fréquence, mais ils sont généralement déclenchés par le stress, le bruit, le toucher ou les mouvements. Le syndrome de l’homme raide peut entraîner des douleurs, des difficultés à marcher, à se pencher ou à se lever, ainsi qu’un risque accru de chutes et de fractures. Il n’existe pas de traitement curatif pour le syndrome de l’homme raide, mais il existe des médicaments qui peuvent soulager les symptômes et améliorer la fonction musculaire.

Comment Céline Dion vit-elle avec sa maladie ?

Céline Dion a révélé qu’elle avait été diagnostiquée avec le syndrome de l’homme raide en 2019, après avoir ressenti des douleurs et des spasmes dans son dos et ses jambes. Elle a confié qu’elle avait dû adapter son mode de vie et sa routine quotidienne pour faire face à sa maladie. Elle a notamment réduit ses activités physiques, modifié son alimentation et suivi une thérapie physique régulière.

Elle a également bénéficié du soutien de sa famille, de ses amis et de ses fans, qu’elle a remerciés pour leur amour et leur compréhension. Céline Dion a affirmé qu’elle restait positive et optimiste malgré les difficultés. Elle a déclaré qu’elle espérait pouvoir reprendre sa tournée européenne dès que possible et qu’elle avait hâte de retrouver son public.

Source : Unsplash

Quelles sont les réactions du monde artistique ?

L’annonce de Céline Dion a suscité une vague d’émotion et de solidarité dans le monde artistique. De nombreux artistes ont exprimé leur soutien et leur admiration pour la chanteuse sur les réseaux sociaux. Parmi eux, on peut citer Lara Fabian, Garou, Patrick Bruel, Jean-Jacques Goldman ou encore Adele.

Ces derniers ont salué le courage, la force et le talent de Céline Dion, qui a su traverser plusieurs épreuves dans sa vie, comme la mort de son mari René Angélil en 2016 ou le cancer de son frère Daniel la même année. Ils ont également souhaité à Céline Dion un prompt rétablissement et ont espéré la revoir bientôt sur scène.

Continue Reading

Actualité

Jenifer Fieschi : pourquoi la chanteuse a changé son nom ?

Published

on

Jenifer change de nom

Jenifer est l’une des chanteuses françaises les plus populaires depuis sa victoire à la Star Academy en 2002. Mais saviez-vous qu’elle ne s’appelle plus Jenifer Bartoli ? La star a en effet changé de nom et adopté celui de son mari, Ambroise Fieschi. Voici tout ce qu’il faut savoir sur ce changement d’identité.

Un mariage discret en Corse

Jenifer et Ambroise Fieschi se sont mariés le 21 août 2019 à Serra-di-Ferro, un petit village corse dont est originaire le père de la chanteuse. La cérémonie s’est déroulée dans la plus grande discrétion, loin des paparazzis et des médias. Seuls les proches du couple étaient présents pour célébrer leur union.

Voici une vidéo relatant ces faits :

Ambroise Fieschi est un restaurateur corse qui possède plusieurs établissements sur l’île de beauté. Il a rencontré Jenifer en 2018, lors d’un concert qu’elle donnait à Ajaccio. Depuis, ils ne se sont plus quittés et ont même eu un enfant ensemble, un petit garçon prénommé Aaron, né en mars 2020.

Un nouveau nom pour une nouvelle vie

En changeant de nom, Jenifer a voulu marquer son attachement à son mari et à sa famille. Elle a ainsi pris le nom de Fieschi, qui est aussi celui de son fils cadet. Sur ses papiers d’identité, elle s’appelle désormais Jenifer Fieschi.

Mais ce changement de nom n’affecte pas sa carrière artistique. La chanteuse continue à se produire sous le nom de Jenifer, qui est son nom de scène depuis ses débuts. Elle a d’ailleurs sorti un nouvel album en octobre 2020, intitulé « Nouvelle page », qui a rencontré un beau succès.

Source : Faispasgenre

Une femme épanouie et heureuse

Jenifer semble avoir trouvé l’équilibre entre sa vie privée et sa vie professionnelle. Elle partage son temps entre la Corse, où elle vit avec son mari et ses enfants, et Paris, où elle travaille sur ses projets musicaux. Elle est également coach dans l’émission « The Voice Kids » sur TF1, où elle transmet sa passion aux jeunes talents.

Jenifer est une femme épanouie et heureuse, qui assume pleinement son nouveau nom et son nouveau statut. Elle a confié au magazine Gala : « Je suis très fière de porter le nom de mon mari. C’est une façon de lui dire que je l’aime et que je suis engagée à ses côtés pour la vie. »

Continue Reading

Trending

Copyright © 2022 | WEBZINE SUR L'INTERSECTIONNALITÉ.