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De la rue aux réseaux sociaux, la PMA en débat.s

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8h45, Paris 16ème, sortie de métro. Je balaie la chaussée des yeux lorsque mon regard croise des inscriptions sur le sol. Nous avons malheureusement tou.te.s vu ces tags envahir les rues de Paris. « Non à la PMA », « PMA sans père = douleur sans fin », une flopée de messages signifiant que sans un père, un enfant ne pourrait être heureux. Malgré les efforts du collectif So.Streetart début septembre 2018 pour recouvrir ces messages d’intolérance par des coeurs, ces inscriptions n’ont toujours pas été nettoyées… comme pour rappeler que la
question divise et qu’elle demeure d’actualité.

La PMA, qu’est-ce que c’est ?

Avant même de devenir un concept qui fait débat dans l’espace public, la Procréation Médicalement Assistée est initialement un ensemble de techniques médicales permettant la procréation en dehors du processus naturel. Ces techniques sont encadrées par la loi relative à la bioéthique (Code de la Santé Publique) du 6 août 2004. Elle précise que l’homme et la femme du couple doivent être vivant.e.s, en âge de procréer, marié.e.s ou en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune d’au moins deux ans et que le couple doit présenter une infertilité pathologique médicalement constatée. La PMA peut être réalisée avec le don de sperme d’un donneur tiers lorsqu’il existe un risque de transmission d’une maladie d’une particulière gravité à l’enfant ou à l’autre membre du couple.
La loi ne s’applique donc qu’aux couples hétérosexuels et l’ouverture de la PMA à toutes les femmes (couples de lesbiennes ou femmes seules) fait largement débat en France, contrairement à la Belgique où l’accès à la PMA voté en 2007 n’a provoqué aucune polémique . Six français.e.s sur dix se disent favorables à l’ouverture de celle-ci et le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’est déclaré en faveur de cette mesure dans sa révision de la loi de bioéthique présentée en septembre 2018.
Malgré ces bonnes nouvelles en faveur de la PMA, ses détracteur.euse.s ne manquent pas. La PMA est un sujet instrumentalisé depuis la promulgation en mai 2013 de la loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe. Bien que l’adoption par les couples du même sexe ait été rendue possible, la PMA (tout comme la GPA) reste quant à elle impossible. De nombreuses femmes se rendent donc dans les pays frontaliers à la France (Belgique ou Espagne) pour avoir recours à un donneur anonyme. Ces démarches à l’international nécessitent non seulement des coûts et un investissement moral élevés mais les femmes qui s’y engagent s’exposent également à des risques sanitaires avec un suivi gynécologique moindre, de potentielles transmissions d’IST, etc.

En 2015, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes est le premier à recommander l’ouverture de la PMA à toutes les femmes en France. Puis, en septembre 2018, à l’heure de la révision de la loi sur la bioéthique, c’est donc au tour du CCNE de s’intéresser à la question et de se placer en faveur du droit à la PMA pour des raisons « d’égalité ».

Le grand retour de la Manif Pour Tous

Dans tout débat sociétal on trouve les « pro.e.s » et les « anti.e.s ». Comme cinq ans auparavant, La « Manif Pour Tous » revient en ligne de front ces derniers mois. Les parisien.ne.s retrouvent une nostalgie amère en souvenir de 2013, quand les tags et autres affiches rhabillaient également les trottoirs. Une première campagne a fait son apparition dans les rues de la capitale début décembre avant l’annonce du Comité, comme pour tenter d’influencer la décision finale de celui-ci. « Filiation fiction », «Tous nés d’un père et d’une mère », « PMA sans papa », comme chaque rentrée les affiches roses et bleues font leur grand retour. Des visuels qui s’inscrivent graphiquement dans ce qui a déjà été fait par la Manif Pour Tous comme pour nous souffler à l’oreille que « ça y est, elle est revenue ».
Le 25 septembre 2018, la « Manif Pour Tous » se réapproprie la rue. Des rassemblements ont lieu devant le siège du CCNE et aux quatre coins de la France le lendemain de l’approbation de la révision de la loi. Mais iels ne sont pas seul.e.s à investir les pavés puisque les défenseur.se.s de la mesure sont ce jour-là aussi dans la rue. Cette manifestation mobilise également les voix des mouvements féministes qui s’élèvent aux quatre coins du globe depuis #MeToo. Le temps est venu pour les femmes de prendre la parole et de prétendre à leurs libertés, dont celle d’avoir recours à la PMA, peu importe leur situation.

Une campagne qui ne décolle pas

Tags, flyers et affichages sauvages constituent un affrontement communicationnel urbain auquel sont désormais habitué.e.s les français.e.s. C’est en octobre dernier que la Manif Pour Tous innove et investi dans une nouvelle campagne avec son hashtag #DeBase. Une campagne pleine d’amour, de roses et de ballons de foot qui vient présenter la nouvelle identité graphique du mouvement : plus épurée, plus « tendance ». Un fond blanc, quelques motifs et une typographie qui attire l’oeil. La Manif Pour Tous se lance une nouvelle fois à la conquête du coeur des français.e.s avec une nouvelle tactique : embrigader la jeunesse.
La campagne serait presque visuellement appréciable, bien que « cheap », jusqu’à ce qu’on lise les textes. Toujours les mêmes slogans, les mêmes appels désespérés de celleux qui se targuent humblement de « défendre les plus faibles » sur Twitter. En parlant de réseaux sociaux, l’hashtag #DeBase ne semble pas fonctionner exactement comme prévu. Le hashtag est davantage employé pour être détourné par les membres de la communauté LGBTI+ que tweeté par des anti.e.s-PMA… Un flop.

 

Mais même si #DeBase est, pour La Manif Pour Tous, représentatif d’un coup de com’ raté, il illustre par ses tweets éclectiques le débat toujours vif et brûlant de la PMA en France.

Avoir le droit d’être parent.e

Le 10 octobre, #BonsParents est un nouvel hashtag qui fait son apparition via une chaine YouTube créée par l’association SOS Homophobie. Le premier spot vidéo, de près d’une minute et réalisé par l’agence TBWA, est relayé rapidement par de nombreux médias et par des célébrités. A travers l’hashtag #BonsParents, les internautes se posent les questions qui dérivent de la PMA. Qu’est-ce que c’est qu’être un.e bon.ne parent.e ? Une interrogation que toute personne s’est déjà posée, en étant parent.e ou enfant, et qui pourtant ne possède
pas de réponse universelle.
La première vidéo de cette chaine Youtube consiste en un spot filmé subjectivement par l’un.e des membres de la famille qui présente diverses situations dans lesquelles l’internaute s’interroge : en tant que parent.e, préfère-t-on s’amuser ou faire les devoirs avec l’enfant ? Plutôt le.a gronder ou le.a réconforter ? Les situations mises en scène nous font réfléchir sur nos propres réactions en tant que potentiel.le parent.e et nous découvrons à la fin de la vidéo que la famille présentée est homoparentale.

Ce spot est en réalité une réponse brillante de l’association SOS Homophobie au hashtag lancé par La Manif Pour Tous. Il émeut, touche et questionne même celleux qui n’avaient pas encore d’avis tranché sur la question. Par la mise en image de la banalité du quotidien d’une famille homoparentale, l’association matérialise son opinion en faveur de l’ouverture de la PMA à travers l’opportunité de donner à tout le monde le droit d’être un.e bon.ne parent.e. Parce que pour SOS Homophobie comme pour ses soutiens : PMA, l’égalité n’attend pas.

Agathe PALHIES

SOURCES :
https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/procreation-medicalement-assisteepma.
php
http://www.vie-publique.fr/actualite/dossier/etats-generaux-2018/bioethiqueouverture-
pma-toutes-femmes-debat.html

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https://www.liberation.fr/france/2018/09/25/pma-la-manif-pour-tous-redescend-dansla-
rue_1681262
https://twitter.com/hashtag/debase

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