Les femmes de chambre des complexes hôteliers des îles Baléares ont obtenu une victoire historique après des années de lutte pour leurs droits. Elles ont réussi à faire reconnaître leur maladie professionnelle et à obtenir une augmentation de salaire et une réduction du nombre de chambres à nettoyer.
Une mobilisation sans précédent
Les « Kellys », comme elles se surnomment elles-mêmes, sont les employées chargées du nettoyage des chambres dans les hôtels. Ce terme vient de l’anglais « the keys » (les clés), car elles sont responsables de la remise des clés aux clients. Elles sont environ 15 000 aux Baléares, une destination touristique très prisée en Espagne.
Depuis 2016, elles se sont organisées en collectifs pour dénoncer leurs conditions de travail précaires et pénibles. Elles souffrent souvent de troubles musculo-squelettiques, dus aux efforts répétés et aux postures inconfortables qu’elles doivent adopter pour faire les lits, passer l’aspirateur ou frotter les sols. Elles sont aussi exposées à des produits chimiques nocifs pour la santé.
Elles réclament une reconnaissance de leur maladie professionnelle, qui leur permettrait d’accéder à des indemnités et à des soins adaptés. Elles demandent aussi une augmentation de salaire et une réduction du nombre de chambres à nettoyer par jour, qui peut atteindre 30 ou 40 dans certains établissements.
Une loi pionnière aux Baléares
Leur combat a fini par payer. En décembre 2020, le Parlement des Baléares a adopté une loi pionnière en Espagne, qui reconnaît la spécificité du travail des femmes de chambre et leur accorde des droits supplémentaires. La loi prévoit notamment :
Une augmentation progressive du salaire minimum des femmes de chambre, qui passera de 1 108 euros brut par mois en 2021 à 1 250 euros en 2024.
Une limitation du nombre de chambres à nettoyer par jour, qui ne pourra pas dépasser 13 dans les hôtels quatre ou cinq étoiles, et 15 dans les autres catégories.
Une reconnaissance automatique de la maladie professionnelle pour les femmes de chambre qui souffrent de troubles musculo-squelettiques, sans avoir à passer par une expertise médicale.
Une formation obligatoire sur les risques liés à leur activité et sur les mesures de prévention à adopter.
Une représentation syndicale spécifique pour les femmes de chambre au sein des comités d’entreprise.
Un exemple à suivre pour le reste du pays
La loi des Baléares est entrée en vigueur le 1er janvier 2021 et concerne tous les hôtels de l’archipel, qu’ils soient publics ou privés. Elle a été saluée par les « Kellys », qui y voient une avancée majeure pour leur dignité et leur santé.
Elles espèrent que cette loi fera des émules dans le reste du pays, où elles sont environ 100 000 à exercer ce métier. Elles comptent sur la solidarité des autres travailleurs du secteur touristique, qui représente plus de 10% du PIB espagnol.
Elles appellent aussi les clients des hôtels à être plus respectueux de leur travail et à ne pas salir inutilement les chambres. Elles leur demandent également de soutenir leur cause en signant des pétitions ou en participant à des manifestations.
Les « Kellys » ont montré qu’elles étaient capables de s’unir et de se faire entendre. Elles ont fait plier les hôtels des Baléares, mais elles ne comptent pas s’arrêter là. Elles veulent que leur travail soit reconnu et valorisé dans toute l’Espagne.