Culture

Eddy De Pretto, un artiste en tout genre

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Révélé lors du Printemps de Bourges et lauréat inRocKs lab 2016, Eddy de Pretto semble bousculer les normes et transcender les genres musicaux. Le jeune chanteur est en passe de devenir l’une des icônes musicales de la génération dite Dolan. Zoom sur un artiste qui dépasse les frontières des genres.

« Tu seras viril mon Kid,
Je ne veux voir aucune larme glisser sur cette gueule héroïque,
Et ce corps tout sculpté »

Dans Kid, chanson de son dernier EP portant le même nom, Eddy de Pretto se met dans la peau d’un parent et dénonce une socialisation genrée qui alimente l’idéal d’une prétendue virilité masculine. Le jeune chanteur de 25 ans met en exergue la construction du genre à travers des paroles tranchées et engagées qui rejoignent les nombreuses analyses sociologiques autour de cette question.

«  Tu seras viril mon Kid,
Tu tiendras dans tes mains, l’héritage iconique d’Apollon,
Et comme tous les garçons, tu courras de ballons en champion,
Et deviendras mon petit héro historique »

C’est de son parcours personnel que se nourrissent ses nombreux textes, faisant référence aux problématiques qui l’ont touché et qui le touchent encore aujourd’hui : la virilité (Kid), la débauche (Monodrogue, Fête de trop), la sexualité (Normal) ou encore les rencontres sur les réseaux sociaux (Jungle de la chope).

Eddy de Pretto a grandi à Créteil, en banlieue parisienne et se retrouve au cœur même de ces questions qui se traduisent le plus souvent par des réflexions à l’école, au collège ou au lycée, sur une prétendue masculinité virile liée par exemple au culte du corps transmis par le sport ou par des jouets censés révéler le genre d’une personne. Au contraire, lui ne cessera jamais de dépasser ces frontières du genre et cela se retrouve dans sa musique.

Sa particularité musicale provient de la fréquentation de deux milieux différents durant son adolescence : celui de sa mère qui passe en boucle les disques de Nougaro ou Barbara, et un autre milieu plus rap à travers la fréquentation d’un foyer de quartier et l’écoute d’artistes comme Rohff, Sinik, Booba ou Diam’s.

Le chanteur fait donc un parallèle entre une construction non-binaire du genre et une construction non-genrée de sa musique qui ne s’inscrit dans aucun registre connu, si bien qu’on la catégorise généralement comme un mélange de chanson française et de rap. L’artiste est d’ailleurs souvent comparé à la voix et au flow de Jacques Brel ainsi qu’à Stromae pour son engagement autour de thématiques connues de tou.te.s. Vous l’avez compris, Eddy de Pretto ne se limite pas aux frontières d’un genre et par ses goûts éclectiques nous surprend de titre en titre comme récemment avec la reprise du titre « Je ne suis pas fou » du rappeur marseillais Jul.

Eddy de Pretto est donc un chanteur clivant et moderne, caractéristique d’une génération de plus en plus tolérante bien que pas assez. A travers des phrases provocantes, le jeune homme de 25 ans cherche à banaliser des faits, qui, même s’ils tendent à ne plus l’être, restent des points qui divisent notre société. Le chanteur écrit donc une réelle poésie du genre à travers la dénonciation de lieux communs sur l’homosexualité et le rôle social voulu par la doxa. C’est cette différenciation par rapport aux autres rappeur.se.s qui, pour moi, fait d’Eddy de Pretto un rappeur plus underground que mainstream.

« Mais jeune homme, sais-tu seulement,
Que je me maquille pour te rentrer dedans.
Ah ça y est ça te glace le sang,
L’idée qu’un homme puisse jouer la folle insupportable,
Aussi bien la brute virilisée,
Ne donne pas ton âme au diable. »

C’est grâce à cette chanson, Normal, que le chanteur a gagné en notoriété, chanson dotée d’une répartie prompte et de paroles électriques autour de l’homosexualité et de la sexualité en général.

Pour sa première date en solitaire aux Etoiles ce lundi 27 novembre, Eddy de Pretto a su séduire un public déjà conquis malgré une interprétation moins agressive de ces chansons. Même si ce manque d’énergie a déçu, les places pour ses prochaines dates en solo partent comme des petits pains et son premier album est attendu pour 2018.

Robin Cabanel

Crédits photos : Axel Morin

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